Le système Braille, ou l’histoire de l’alphabet des mal voyants

Cet article fait suite à celui sur Valentin Haüy

Louis Braille a pu mettre au point le braille grâce à l’invention d’un système d’ écriture de Charles Barbier de la Serre.

1) Charles Barbier de la Serre

Ancien officier d’artillerie, il s’intéresse depuis longtemps à l’écriture. Il veut mettre au point une écriture universelle, projet déjà en vigueur au XVIIIème siècle, qui se prolonge au début du XIXème siècle.
En 1808, il publie Tableau d’expédiographie, suivi en 1809 d’un « manuel permettant d’apprendre sans maître un système d’écriture accélérée de son invention » (Vivre sans voir : Les aveugles dans la société française, du Moyen Âge au siècle de Louis Braille, Zina Weygand) qu’il appelle « expéditive française ». Cet ouvrage, Principes d’expéditive française pour écrire aussi vite que la parole est suivi de l’exposé de Principes d’écriture coupée pour suppléer la plume et le crayon et exécuter plusieurs copies à la fois sans tracer de caractères. L’expéditive un trucest assez complexe. En revanche, « l’écriture coupée se résume à quelques signes très simples, qui combinés entre eux selon une gamme alphabétique apprise par cœur, représentent les lettres et les sons de la langue »(idem) . Pour tracer ces signes, on se sert d’une petite lame tranchante. En 1815, il publie un ouvrage présentant douze écritures différentes qu’il classe en trois catégories : écriture facile, écriture de combinaison et écriture accélérée. L’un de ces procédés est un procédé d’écriture ponctuée, perceptible au doigt comme à l’œil, constituée d’une combinaison de douze points. Il spécifie dans cet ouvrage l’intérêt que cela peut présenter pour les aveugles.
Le docteur Guillié, qui est alors directeur de l’Institution des aveugles-nés (fondée par Valentin Haüy), refuse cette méthode, mais elle est mise en application, avec succès, auprès des aveugles des Quinze-Vingts. A son arrivée, Pignier accepte immédiatement cette méthode qui révolutionne les techniques d’apprentissage, qui n’avaient pour ainsi dire pas évolué depuis sa fondation. Barbier simplifie à cet usage son dispositif qui est alors constitué « d’une planchette « rayée en son milieu par une portée de six lignes parallèles […] creusées dans le bois à la distance de moins d’une ligne les unes des autres » , d’une bande en fer blanc « percée dans toutes sa longueur par des ouvertures verticales de deux lignes au plus large, sur un pouce de hauteur » , séparées des autres par des pleins, et d’une pointe émoussée « d’une grosseur égale à la cavité des lignes creusées dans la règle »  » .
Parmi ceux qui veulent perfectionner ce système se trouve Louis Braille, entré à l’Institution en 1819.

2) Louis Braille (1809-1852)

Louis BrailleNé en 1809 à Coupvray, en Seine-et-Marne, il perd la vue, suite à un accident, à l’âge de trois ans. Malgré son infirmité, ses parents l’envoient à l’école municipale et continuent à lui demander d’exécuter des travaux manuels, lui permettant ainsi d’acquérir une certaine dextérité. Il entre à l’Institution royale des jeunes aveugles le 15 février 1819. Très rapidement, il s’avère être un élève particulièrement doué. Lorsqu’en 1821 la sonographie est introduite à l’Institution, il a 12 ans, et il cherche à la perfectionner. En 1829, il écrit une explication de ce procédé, mais celle-ci présente des imperfections. En effet, pour certains signes il y a une combinaison de points et de traits lisses, mais ces traits lisses se distinguent assez mal des points. En 1837, paraît la seconde édition de son procédé, où il a opté pour six points au lieu de douze, simplifiant ainsi considérablement le système. En 1830, ce système est utilisé dans les classes pour la prise de notes et la rédaction des devoirs.
P. F. Foucault, ancien élève, continue de fréquenter l’Institution. Sa collaboration avec L. Braille donne naissance à la écrire première machine à écrire permettant aux aveugles de correspondre avec les « clairvoyants ».

L’utilisation de l’écriture en points saillants à l’Institution va disparaître pendant un certain moment, après la retraite forcée de Pignier en 1840. Son successeur, P. A. Dufau veut revenir au moyen ordinaire, mais s’aperçoit assez vite de la supériorité du système Braille. A partir de ce moment-là ce système est définitivement adopté.
Louis Braille meurt le 6 janvier 1852 de phtisie dont il souffrait depuis plus de vingt ans.
Il faudra attendre le 27 septembre 1878 pour que soit décidé la généralisation de système Braille non modifié.

3) Le système Braille : fonctionnement

Le système Braille est avant tout un alphabet et cet alphabet repose sur la combinaison de six points.
Ainsi, cet alphabet pour mal voyants comporte quarante lettres, au lieu de vingt-six pour l’alphabet français ordinaire. A l’inverse de l’écriture des voyants qui présente différentes sortes de tracés (majuscule, minuscule, script, imprimerie,…), celle-ci n’en présente qu’un. De ce fait, pour indiquer une majuscule, il suffit de faire précéder la lettre du signe conçu à cet usage.

Le même alphabet permet de représenter les signes mathématiques.

Il est utilisé aussi pour la notation musicale.

Cet alphabet s’est répandu mondialement puisqu’il est utilisé, d’après l’UNESCO, dans quatre-vingt cinq pays et il existe soixante cinq alphabets braille.

« Le braille est produit de différentes manières. On peut utiliser une tablette métallique ou plastique et un poinçon, une machine à écrire spéciale dont les six touches correspondent aux six points de la cellule braille ou encore un ordinateur qui traduit, transcrit et reproduit le braille. L’informatique a en effet ouvert de nouvelles voies pour la saisie, la reproduction répétitive et la transmission à distance des textes en braille. »

C’est donc dans l’Institution de Valentin Haüy que Louis Braille, jeune homme de génie, a pu mettre au point son système, à partir de l’écriture inventée par Charles Barbier de la Serre. Mais cet enseignement est resté longtemps réservé à une infime partie des aveugles. (voir la suite dans l’article les aveugles dans notre société).