La Grande Vadrouille 17 Millions d’entrées

Alors qu’aujourd’hui on s’interroge sur l’incroyable (improbable ?) succès des Ch’tis, essayons de voir ce qui peut contribuer au succès d’un film. Car après plus de 100 ans d’existence, le cinéma est en mesure de faire un premier bilan sur ce qui fait exploser le box office. Est-ce le talent, l’argent, la popularité de l’artiste qui le joue ou le met en scène ? Premiers éléments de réponse.

Le talent

Le talent est plus en phase avec le succès d’estime, un succès critique ne se retranscrit pas forcément dans les salles. Des gens peuvent avoir du talent dans un domaine, comme Bernard Henri Levy, et se planter lamentablement au cinéma en réalisant « Le jour et la nuit », fiasco dans les salles et élus comme un des pires navets de l’histoire du cinéma.

 

La popularité de l’artiste

Là aussi, cela n’est pas une garantie de succès. Prenons deux exemples : Patrick Sébastien, animateur populaire, aimé du public, fait un four avec son premier film « T’aime ». Jean-Marie Bigard, humoriste populaire, aimé du public, fait un four avec son premier film « L’âme sœur ». Ils jurent qu’on ne les y reprendra plus. Cependant, Patrick Sébastien semble préparer une adaptation de son livre « La cellule de Zarkane », écrit sous le pseudonyme de Joseph Lubsky, avec Benoît Magimel dans le rôle titre.

 

L’argent

Est-ce que l’argent injecté dans un film en fait forcément la valeur et permet de convaincre le public d’aller le voir grâce à une promotion envahissante ? Assurément non. L’histoire récente nous le prouve : Astérix aux Jeux Olympiques, un budget record de 78 Millions d’Euros, une pléiade de stars, naviguant sur un scénario poussif et au final un film qui peine à atteindre les 7 millions de spectateurs. Certes peu de films peuvent se vanter d’atteindre un tel nombre d’entrées, seulement Thomas Langmann (réalisateur et producteur du film) misait sur 20 millions de places vendues. « Astérix : Mission Cléopâtre » avec deux fois moins de sous, fit le double d’entrées en salles. « Bienvenue chez les ch’tis », avec 78 fois moins de sous, est en passe de battre le record d’entrées pour un film français, détenu par Gérard Oury et sa Grande Vadrouille (17 millions d’entrées) et même celui de Titanic (près de 20 millions d’entrées).

Mission Cléopatre 15 Millons d’entrées Asterix aux Jeux Olympiques 7 Millions d’entrées

« Bienvenue chez les Ch’tis » n’a absolument rien d’une comédie épique contrairement aux oeuvres cinématographiques d’Oury à base de chevauchées fantastiques (La folie des grandeurs), de poursuites infernales (La Grande Vadrouille, Le Corniaud), de succession de scènes culte (La Grande Vadrouille, Rabbi Jacob) ou d’une histoire d’amour majestueuse à bord d’un bateau qui coule à la fin : Titanic.

Bienvenue chez les Ch’tis en passe de tout détrônerAvec « Bienvenue chez les Ch’tis », la simplicité du récit semble l’emporter sur le foisonnement des idées. Le succès du film de Dany Boon nous démontre qu’à de rares exceptions, ce sont les comédies, dites populaires, qui cartonnent. Le public qui remplit les salles en masse ne voit donc pas le cinéma comme un art au sens philosophique du terme (c’est-à-dire un pur objet esthétique) mais comme un gigantesque instrument de distraction, qui vous fait passer un bon moment, et qui, aussitôt vu, est aussitôt oublié. « C’était bien les Ch’tis hein ? » « Oui » « J’ai adoré le dialogue entre Kad Merad et Dany Boon sur les meubles » « Ch’est les chiens, ah ah » « Et puis quand y font leur tournée complètement bourrés » « Trop drôle ». Voilà.

La profondeur d’un Lynch, la virtuosité d’un Martin Scorcese, la grandeur d’un Kubrick, quid ? Le succès d’une bonne comédie française ou d’un gros blockbuster d’action américain participe au financement de films aux budgets et aux succès plus modestes. Est-ce que les Ch’tis garderont ce prestige toujours intact qu’ont par exemple « Les Tontons Flingueurs », « La Grande Vadrouille » ou « Les Bronzés » (les deux premiers, surtout pas le troisième, un carton au box office qui a dû se faire sur un malentendu « jeanclaudedussien »).

 

Après « Camping », il y a fort à parier que le nouveau film de Fabien Oteniente, « Disco », devienne le prochain gros succès français. Les orfèvres du cinéma peuvent trembler, la comédie populaire n’a pas dit son dernier mot.

Prochain gros carton ? Titanic 20 Millions d’entrées, l’exception qui confirme la règle